Blessures et guérison

On parle beaucoup, depuis 10 à 20 ans, de blessures et de guérison ou plutôt de guérison des blessures. En tapant cette expression sur Google, il s’affiche environ 2 millions de résultats. Comment s’y retrouver dans ce labyrinthe de la guérison intérieure où on trouve toutes sortes d’approches.

Dans la tradition chrétienne,

On associe la blessure au péché et la guérison au salut.

Avec le péché originel, l’homme s’est détourné de Dieu et a perdu son unité intérieure corps / affectivité / esprit. Il ne se comprend plus et ne se maitrise plus.

La guérison correspond donc au salut, l’homme est sauvé du péché et entre à nouveau dans l’ordre de la Grâce qu’il lui est donné d’accueillir.

Dans une vision psychothérapeutique

On utilise finalement peu le mot « blessure ». On parle de souffrance, de symptômes, de troubles ou encore de traumatismes.

On réserve plutôt le terme de blessure au narcissisme, parlant alors de blessure narcissique (de l’image de soi ou de l’estime de soi)

Quant à la guérison, elle concerne la disparition éventuelle d’un symptôme, la diminution ou suppression de la souffrance psychique et l’amélioration globale du fonctionnement de l’individu, dans sa relation à lui-même et aux autres.

Freud disait « qu’une analyse était finie lorsque qu’une personne retrouvait ses capacités d’aimer et de travailler.» Autrement il considérait que la personne était guérie principalement à partir de ces deux critères et finalement cela n’a pas beaucoup changé aujourd’hui. On pourrait ajouter des nuances comme autonome, responsable, mais globalement lorsqu’une personne est capable d’assumer sa vie, de s’y engager, on peut dire que la thérapie est finie. Cela ne veut pas dire qu’elle a tout résolu mais qu’elle peut faire avec son humanité.

Finalement lorsqu’on regarde ces deux visions, les différences sont assez claires, alors qu’est ce qui crée la confusion actuelle ?

Il semble que cela soit lié à un changement de la société qui par certains aspects est de plus en plus narcissique.

Les personnes sont plus individualistes et donc en recherche d’un bien être, y compris dans leur rapport à la foi et à la religion. Nous sommes passés d’une culture du devoir à celle de la recherche d’un bien-être personnel.
DES DIMENSIONS DIFFERENTES

Nous l’avons dit il s’agit de dimensions différentes, même si l’homme est un et que cela va passer concrètement par des aspects paraissant identiques comme la relation aux autres, au monde, les comportements, les idéaux, les valeurs, etc.

Dans l’accompagnement spirituel, il s’agit en premier lieu de la dimension transcendantale de la personne, de son rapport à Dieu, au sens de la vie, et de son articulation dans sa vie quotidienne.

La psychothérapie concerne la résolution des conflits psychiques, le soulagement des souffrances psychiques, la guérison de symptômes, ainsi que l’amélioration de la relation à soi même et aux autres.
Cela fait que le prêtre portera plutôt un regard sur la vie affective en termes d’équilibrage des passions et des vertus, de même qu’il observera la vie en lien avec la morale chrétienne, l’oraison, les sacrements.
Pour le psy la question se pose autrement. Il fera une lecture aux niveaux inconscients, pulsionnels, des défenses, des fantasmes.
Il aidera la personne la personne à prendre conscience des processus qui agissent en elle souvent à son insu pour l’aider à les gérer. Il recherchera ce qui pousse le sujet à tel ou tel comportement, les confits internes, les reproductions et comment les résoudre.
L’IMPORTANCE D’ACCUEILLIR LA FOI DES PATIENTS

Il est important que le psy puisse écouter le patient lorsqu’il parle de sa foi et qu’il respecte cette dimension de la personne.
Le travail du psy n’est pas d’intervenir dans la croyance de ses patients, mais lorsqu’il y en a, de détecter les aspects liées à un trouble ou à une pathologie et d’aider le patient à en prendre conscience. Autrement dit, il s’agit d’aider la personne à faire le tri de ce qui relève de sa dimension psychologique.

LA PLACE DU PARDON

C’est une notion centrale de la foi chrétienne.
En psychothérapie, on ne cherche pas le pardon mais il se produit généralement sous la forme du pardon à soi même et à l’autre. D’abord par la compréhension que les causes du mal être sont aussi internes, en faisant la vérité sur soi. D’autre part l’acceptation de son humanité permet d’accepter celle de l’autre. Tout cela conduit naturellement au pardon.

Par contre lorsqu’une personne cherche le pardon de Dieu pour un acte posé qu’elle considère comme mal, cela ne relève évidement pas de l’accompagnement psychologique mais du sacrement de réconciliation. Dans ce cas le psy doit savoir le dire et orienter la personne vers un prêtre.

LA CULPABILITE

Lorsque la culpabilité est chronique ou récurrente, comme dans les scrupules, cela nécessite un accompagnement psychologique.

Il est important de distinguer ce qui relève d’une culpabilité saine, en lien avec un acte répréhensible, d’une culpabilité pathologique, même inconsciente, qui enferme l’individu.

En conclusion

Mais il est parfois difficile pour un prêtre d’être confronté à une personne qui ne veut pas entendre parler de psychothérapie.

Pour certaines personnes, il y a l’impression que la foi peut donner réponse à tout, y compris à l’équilibre affectif. Il est alors nécessaire de l’aider à réaliser que la foi ne vise pas à s’enfermer dans la souffrance comme cela arrive parfois à cause d’une mauvaise compréhension.

Il est important de respecter la foi tout en aidant la personne à prendre conscience que quelque chose ne va pas dans son discours. Pour cela il peut être intéressant de revenir à l’encyclique de Jean Paul 2 sur le sens chrétien de la souffrance.

Toutefois s’il est important, comme nous l’avons vu, de bien dissocier ce qui relève de la dimension psychologique et spirituelle, il y aura une intégration et une unification, dans la personne, qui se fera au terme de ce travail sur soi.

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