par Pascal Parinet | Déc 2, 2014 | psychologie&spiritualité
LES SCRUPULES
Les scrupules constituent une ou des obsessions en lien avec une conscience morale tyrannique et liées à la culpabilité.
Le scrupule concerne la culpabilité par rapport à un idéal. Lorsque la conscience morale et l’idéal s’associent à la culpabilité, il y a alors des scrupules.
Les « bons » scrupules
Il arrive à tout le monde de ressentir des scrupules par rapport à une action qu’on pourrait qualifier de limite sur le plan morale, par exemple d’annuler un rendez vous au dernier moment. Cela arrive lorsque la décision repose sur un choix qui met en jeu la morale mais que ce choix n’est pas très clair pour la personne ou en tout cas as assumé. Elle ressent alors des scrupules qui sont l’expression de son sentiment de culpabilité face au doute ou au flou du choix à prendre. Cela arrive également lorsqu’il y a une obligation de prendre une décision ou d’agir qui va à l’encontre de sa morale.
Ces types de scrupules sont normaux et sains car ils signalent à la personne qu’elle va à l’encontre de sa morale.
Lorsque le scrupule devient pathologique
Les scrupules deviennent pathologiques lorsqu’ils présentent les aspects suivant:
soit parce qu’ils ne sont pas en proportion avec l’évènement ou n’ont pas de lien direct avec
soit parce qu’ils sont chroniques
soit encore parce que la personne fait tout ce qu’elle peut pour éviter la situation sans y arriver et donc subi les évènements avec un sentiment de culpabilité
En dehors des quelques situations que nous avons cité précédemment on peut dire que la majorité des scrupules sont pathologiques.
Il arrive fréquemment que les scrupules se fixent sur des aspects religieux chez les croyants. Dans ce cas, ils vont par exemple se porter sur la notion de péché ou sur tout ce qui peut rejoindre les questions de morale en lien avec la pratique religieuse. Il ne s’agit pas alors de problématique spirituelle mais bien d’un trouble psychologique qui va se fixer sur des questions spirituelles.
Les scrupules, lorsqu’ils sont pathologiques, sont source de souffrance, parfois très grande, et donner des angoisses importantes.
Il est important de ne pas porter un regard moral, même religieuse, sur la problématique apportée, car cela ne fait que renforcer les scrupules, mais plutôt de proposer à la personne d’entreprendre une psychothérapie.
Comment se libérer des scrupules
La première chose consiste à déculpabiliser. Les scrupules sont l’expression directe d’une culpabilité qui se fixe sur certains aspects de la vie de l’individu. Pour cela il est nécessaire que la personne puisse prendre conscience du décalage qui existe entre sa culpabilité et la réalité. Il y a donc, dans un premier temps, tout une travail psychothérapeutique en lien avec la culpabilité, les angoisses éventuelles et les pensées morbides.
Lorsque celles ci seront atténuées, il sera possible d’approfondir et de traiter les scrupules comme nous l’avons vu pour les autres pensées obsessionnelles, tout en déculpabilisant systématiquement à chaque fois où ce sera nécessaire.
Cela nécessite d’abord d’être conscient de la chronologie du processus: de la situation à l’origine, des ressentis, des pensées qui en découlent, du scénario, etc… Ensuite il convient de se poser la question de l’adéquation. Est ce que le ressenti est juste, est ce que les pensées correspondent à la situation, est ce que le scénario n’est pas imaginaire. Dans bien des cas en persévérant, il sera possible de réaliser que ce n’est que de l’imagination et d’apprendre à les réfuter.
Ensuite il sera souvent utile de remonter le cycle du processus pour pouvoir l’arrêter dès l’origine. Autrement dit il convient de faire le chemin inverse en prenant conscience de chacune des étapes pour revenir à un mode de fonctionnement sain.
Enfin, il à partir de là, il sera possible de trouver d’autres chemins en étant plus conscient :
des mécanismes qui jusqu’alors était inconscients
de ses ressentis et des pensées qui en découlent
pour pouvoir trouver une adaptation plus créatrice
Parallèlement il sera nécessaire de retrouver le contact avec le concret, avec l’environnement et avec les autres car la personnes en prise avec des pensées obsessionnelles est coupée de l’environnement. Il s’agira donc d’apprendre à vivre dans « l’ici et maintenant » et non pas ailleurs ou dans un autre temps.
Le fait de renouer avec le contact permettra de remettre en route l’adaptation créatrice qui sera un antidote à l’enferment dans les pensées. Tout cela se déroule dans le cadre d’une psychothérapie.
par Pascal Parinet | Oct 29, 2014 | psychologie&spiritualité
Blessures et guérison
On parle beaucoup, depuis 10 à 20 ans, de blessures et de guérison ou plutôt de guérison des blessures. En tapant cette expression sur Google, il s’affiche environ 2 millions de résultats. Comment s’y retrouver dans ce labyrinthe de la guérison intérieure où on trouve toutes sortes d’approches.
Dans la tradition chrétienne,
On associe la blessure au péché et la guérison au salut.
Avec le péché originel, l’homme s’est détourné de Dieu et a perdu son unité intérieure corps / affectivité / esprit. Il ne se comprend plus et ne se maitrise plus.
La guérison correspond donc au salut, l’homme est sauvé du péché et entre à nouveau dans l’ordre de la Grâce qu’il lui est donné d’accueillir.
Dans une vision psychothérapeutique
On utilise finalement peu le mot « blessure ». On parle de souffrance, de symptômes, de troubles ou encore de traumatismes.
On réserve plutôt le terme de blessure au narcissisme, parlant alors de blessure narcissique (de l’image de soi ou de l’estime de soi)
Quant à la guérison, elle concerne la disparition éventuelle d’un symptôme, la diminution ou suppression de la souffrance psychique et l’amélioration globale du fonctionnement de l’individu, dans sa relation à lui-même et aux autres.
Freud disait « qu’une analyse était finie lorsque qu’une personne retrouvait ses capacités d’aimer et de travailler.» Autrement il considérait que la personne était guérie principalement à partir de ces deux critères et finalement cela n’a pas beaucoup changé aujourd’hui. On pourrait ajouter des nuances comme autonome, responsable, mais globalement lorsqu’une personne est capable d’assumer sa vie, de s’y engager, on peut dire que la thérapie est finie. Cela ne veut pas dire qu’elle a tout résolu mais qu’elle peut faire avec son humanité.
Finalement lorsqu’on regarde ces deux visions, les différences sont assez claires, alors qu’est ce qui crée la confusion actuelle ?
Il semble que cela soit lié à un changement de la société qui par certains aspects est de plus en plus narcissique.
Les personnes sont plus individualistes et donc en recherche d’un bien être, y compris dans leur rapport à la foi et à la religion. Nous sommes passés d’une culture du devoir à celle de la recherche d’un bien-être personnel.
DES DIMENSIONS DIFFERENTES
Nous l’avons dit il s’agit de dimensions différentes, même si l’homme est un et que cela va passer concrètement par des aspects paraissant identiques comme la relation aux autres, au monde, les comportements, les idéaux, les valeurs, etc.
Dans l’accompagnement spirituel, il s’agit en premier lieu de la dimension transcendantale de la personne, de son rapport à Dieu, au sens de la vie, et de son articulation dans sa vie quotidienne.
La psychothérapie concerne la résolution des conflits psychiques, le soulagement des souffrances psychiques, la guérison de symptômes, ainsi que l’amélioration de la relation à soi même et aux autres.
Cela fait que le prêtre portera plutôt un regard sur la vie affective en termes d’équilibrage des passions et des vertus, de même qu’il observera la vie en lien avec la morale chrétienne, l’oraison, les sacrements.
Pour le psy la question se pose autrement. Il fera une lecture aux niveaux inconscients, pulsionnels, des défenses, des fantasmes.
Il aidera la personne la personne à prendre conscience des processus qui agissent en elle souvent à son insu pour l’aider à les gérer. Il recherchera ce qui pousse le sujet à tel ou tel comportement, les confits internes, les reproductions et comment les résoudre.
L’IMPORTANCE D’ACCUEILLIR LA FOI DES PATIENTS
Il est important que le psy puisse écouter le patient lorsqu’il parle de sa foi et qu’il respecte cette dimension de la personne.
Le travail du psy n’est pas d’intervenir dans la croyance de ses patients, mais lorsqu’il y en a, de détecter les aspects liées à un trouble ou à une pathologie et d’aider le patient à en prendre conscience. Autrement dit, il s’agit d’aider la personne à faire le tri de ce qui relève de sa dimension psychologique.
LA PLACE DU PARDON
C’est une notion centrale de la foi chrétienne.
En psychothérapie, on ne cherche pas le pardon mais il se produit généralement sous la forme du pardon à soi même et à l’autre. D’abord par la compréhension que les causes du mal être sont aussi internes, en faisant la vérité sur soi. D’autre part l’acceptation de son humanité permet d’accepter celle de l’autre. Tout cela conduit naturellement au pardon.
Par contre lorsqu’une personne cherche le pardon de Dieu pour un acte posé qu’elle considère comme mal, cela ne relève évidement pas de l’accompagnement psychologique mais du sacrement de réconciliation. Dans ce cas le psy doit savoir le dire et orienter la personne vers un prêtre.
LA CULPABILITE
Lorsque la culpabilité est chronique ou récurrente, comme dans les scrupules, cela nécessite un accompagnement psychologique.
Il est important de distinguer ce qui relève d’une culpabilité saine, en lien avec un acte répréhensible, d’une culpabilité pathologique, même inconsciente, qui enferme l’individu.
En conclusion
Mais il est parfois difficile pour un prêtre d’être confronté à une personne qui ne veut pas entendre parler de psychothérapie.
Pour certaines personnes, il y a l’impression que la foi peut donner réponse à tout, y compris à l’équilibre affectif. Il est alors nécessaire de l’aider à réaliser que la foi ne vise pas à s’enfermer dans la souffrance comme cela arrive parfois à cause d’une mauvaise compréhension.
Il est important de respecter la foi tout en aidant la personne à prendre conscience que quelque chose ne va pas dans son discours. Pour cela il peut être intéressant de revenir à l’encyclique de Jean Paul 2 sur le sens chrétien de la souffrance.
Toutefois s’il est important, comme nous l’avons vu, de bien dissocier ce qui relève de la dimension psychologique et spirituelle, il y aura une intégration et une unification, dans la personne, qui se fera au terme de ce travail sur soi.
par Pascal Parinet | Oct 29, 2014 | psychologie&spiritualité
Articulation psychologique spirituel
L’ACCOMPAGNEMENT SPIRITUEL
Les personnes qui en font la demande viennent pour un approfondissement de la foi, pour apprendre à prier, ou encore parce qu’ils sont en souffrance.
La finalité de l’accompagnement est de permettre de découvrir dans sa vie la volonté de Dieu. Pour pouvoir y répondre et agir en conséquence. Il s’agit d’apprendre à être un disciple du Christ et de s’unir à Dieu.
L’accompagnateur peut prendre ses références chez St François de Sales, St Ignace de Loyola, Sainte Thérèse ou encore St Augustin, mais il doit également connaitre la nature humaine car il accueille la personne dans sa globalité.
La psychothérapie
Le psy accueille également la personne dans sa globalité mais avec des objectifs très différents. En général, la personne veut régler des difficultés ou est en souffrance.
L’objectif sera de repérer ce qui se reproduit dans la vie de la personne mais aussi en séance et de réparer par les prises de consciences et par un accueil inconditionnel.
C’est parce que la personne se sent acceptée telle qu’elle est qu’elle peut changer. Le paradoxe du changement c’est d’être soi même.
Mais la psychothérapie ne concerne pas uniquement le mal être. Dans la phase de reconstruction, elle concerne également la créativité, la découverte de ses ressources, la confiance et le lâcher prise.
Une différence d’accompagnement
L’objectif n’est donc pas le même. Même si aujourd’hui on a l’impression que les demandes semblent se rejoindre dans une demande psycho-spirituelle ou de développement personnel, cela reste très différent.
D’autre part, il est important que la personne sache à qui elle s’adresse et quel sera le contenu de l’accompagnement.
Les places de psy et d’accompagnateur spirituel ne sont pas permutables et encore moins superposables. Dans « l’avenir d’une illusion » Freud mettait en garde le Pasteur Pfister sur le fait qu’on ne peut pas être à la fois prêtre et psychanalyste et qu’il fallait séparer ces fonctions (pas plus que médecin et psychanalyste, mais pour d’autres raisons)
En effet, le psy ne peut pas être en lieu et place de l’idéal du moi (idéal ou modèle auquel doit correspondre ou « doit être » la personne), alors que le prêtre montre justement cet idéal dans son accompagnement. Le prêtre ne peut pas non plus prendre la place du psy au risque de se trouver piégé dans le transfert.
Nous retrouvons là un équivalent sur le plan psychologique, de la séparation des fonctions d’autorité et de direction spirituelles qui a lieu dans l’église.
Il est donc indispensable que ces fonctions soient séparées sinon il y a des risques de dérives sectaires (gourou) et à l’extrême de comportement tyranniques. Et cela ne peut se faire que par une séparation des fonctions et donc de l’accompagnement.
Quels sont les critères de discernement pour les sessions de guérison
Il faudrait distinguer les sessions spirituelles et celle de guérison. Pour ces dernières :
Elles ne s’adressent pas aux personnes présentant des fragilités ou troubles psychiques car il y a alors un risque important de décompensation
Le niveau émotionnel doit être gérer pour ne pas fragiliser les retraitants et cela en fonction de la durée de la retraite.
Attention à tout ce qui serait de l’ordre de manifestations hystériques individuelles ou collectives.
Attention au complexe du homard, qui se débarrasse de sa carapace (mue) et se retrouve vulnérable, les atterrissages sont parfois difficiles.
Attention aux interprétations sauvages, souvent imaginées comme des révélations
Attention à ne pas ouvrir une boite de pandore qui fragiliserait beaucoup la personne et nécessiterait alors une psychothérapie
Attention aux injonctions, à tout ce qui sépare de la famille ou de ses groupes d’appartenance.
Mais beaucoup de personnes, qui allaient relativement bien dans leur vie, en reviennent heureux et souvent renouvelés dans leur foi. Mais il y a également un certain nombre de personnes qui se retrouvent fragilisées.
Le mieux serait de reconnaitre et d’appeler ces retraites « spirituelles ou de pardon »